Tout ça pour dire

14 octobre 2020

Mon cœur bat plus vite. Ma bouche est sèche. Ma gorge se serre. Et le doute monte. De quel droit. De quel droit..

Mon cœur bat plus vite. Ma bouche est sèche. Ma gorge se serre.
Et le doute monte.
De quel droit. De quel droit je prends ici la parole.
Est-ce que j’ai vraiment quelque chose à dire?
Quand j’ai parlé de mon projet de podcast à une amie, elle m’a fait un drôle d’air. Et puis elle a dit : « wow, t’as du courage. »
Quand j’avais présenté mon projet de spectacle solo La fille du facteur au directeur artistique d’une compagnie de théâtre, il m’avait dit « wow, ça prend du courage pour raconter une histoire vraie. »

Pourquoi toujours cette notion de courage évoquée quand on annonce qu’on va prendre la parole? Qu’on va dire « je »?

Est-ce qu’on dirait la même chose à un homme?

De tout temps, les femmes ont été poussées au silence.
Leur prise de parole est toujours reléguée
aux affaires de bonnes femmes,
à l’autofiction (le terme est dit avec un petit rictus de dédain),
à la biographie (même expression condescendante, comme si on parlait d’un livre de recettes).
ou au domaine de l’intime (l’intime ne pouvant jamais, bien sûr, être synonyme de littérature ou d’œuvre d’art).

Alors, à chaque fois que les battements de mon cœur s’accélèrent, que mon souffle se loge dans le haut de ma poitrine, que des sueurs froides m’envahissent… à chaque fois que je remets en doute ma prise de parole, je dois me marteler ces mantras dans tout le corps :

« Le personnel tend vers l’universel ».
« L’intime est politique »

Écoutez sur ces plateformes